Une alliance démocratique, anti-monopoliste et anti-impérialiste devra avoir pour objectif la restructuration démocratique de la société canadienne, afin de donner la priorité aux intérêts de la majorité des Canadiens et Canadiennes et de briser la domination du capital financier sur tous les aspects de la vie. Elle devra chercher à faire avancer les intérêts des masses laborieuses en utilisant tous les moyens disponibles de lutte, fondés sur une action de masse unie et extraparlementaire.

Cette alliance devra aspirer à remporter des victoires électorales et à conquérir le pouvoir grâce à un gouvernement populaire déterminé à prendre des mesures radicales, pour démocratiser la société et transformer les relations économiques dans l’intérêt de la classe ouvrière et de la population canadienne dans son ensemble.

Une telle percée sera difficile à réaliser étant donné les moyens sophistiqués dont dispose la classe dirigeante pour manipuler l’opinion publique, décourager le militantisme politique et influencer autrement le résultat des élections bourgeoises. L’une des tâches essentielles de l’alliance devra consister à défendre et promouvoir la démocratie, tout en luttant contre les attaques des entreprises et des gouvernements contre le processus électoral.

Un gouvernement démocratique antitrust, fondé sur une majorité parlementaire et agissant de concert avec les mouvements populaires extraparlementaires unis et militants, marquerait un changement qualitatif dans l’équilibre des forces de classe au sein de la société canadienne, et ouvrirait la porte à la transformation révolutionnaire vers le socialisme. Cela aurait l’effet d’impliquer le peuple d’une façon vraiment concrète.

Un gouvernement populaire s’engagerait à mettre en œuvre un programme d’action visant à servir le peuple avant les profits. Surgissant au cours des luttes sociales, économiques et politiques de la classe ouvrière et de ses alliés démocratiques, ce programme serait soumis à la discussion la plus large et à l’approbation de toutes les forces de l’alliance.

Les communistes devront lutter pour obtenir le soutien du programme de transformation politique, économique et sociale le plus avancé possible, en fonction de l’évolution des conditions. Le programme doit viser : (1) à confronter et à restreindre le pouvoir du capital financier (tant étranger que national), ainsi qu’à étendre la propriété publique des secteurs clés de l’économie; (2) à redistribuer les richesses et à élever le niveau et les conditions de vie de la grande majorité de la population; et (3) à introduire des réformes démocratiques radicales pour renforcer le contrôle populaire et la gestion de l’État canadien à tous les niveaux de gouvernement.

Pour que les masses laborieuses puissent exercer un contrôle démocratique et souverain sur l’économie canadienne, la domination du capital financier international devra d’abord être contestée puis brisée. Les communistes proposent un programme populaire qui viserait à réduire le pouvoir de monopole par le biais de réformes fiscales radicales, qui augmenteraient considérablement les impôts sur les bénéfices des entreprises et la richesse individuelle, par l’établissement de contrôles sur les investissements, la bourse et les activités spéculatives, et par l’élargissement des droits des travailleurs et travailleuses à décider des pratiques en matière de travail, de gestion et d’investissement. Le programme populaire impliquerait également d’inverser la privatisation et de passer à la nationalisation, ainsi que de placer sous contrôle populaire démocratique les monopoles existants dans les secteurs vitaux de l’économie, en particulier dans le secteur financier (banques et institutions financières), dans le secteur de l’énergie et des ressources naturelles (extraction, production, etc.), ainsi que dans celui des transports et des communications. Des mesures seraient également nécessaires pour obtenir le contrôle démocratique public sur le commerce extérieur et pour retirer le Canada de l’ALÉNA 2.0 (ACEUM), de l’AECG, de l’OMC et d’autres accords d’investissement et blocs commerciaux injustes et favorables aux entreprises.

La lutte pour la souveraineté économique, politique et culturelle devra constituer un élément essentiel de ce programme populaire. Le contrôle de la souveraineté est essentiel pour assurer que la classe ouvrière et ses alliés puissent mener à bien le reste du programme de transformation sociale et avancer vers un Canada socialiste.

Les mesures visant à redistribuer la richesse et à améliorer le niveau et les conditions de vie de la grande majorité du peuple devraient inclure (entre autres réformes) les suivantes :

1. une réduction substantielle de la journée et de la semaine de travail, sans réduction de salaire ni perte de service pour le public;

2. d’importantes hausses des taux de salaire minimum, des pensions et d’autres avantages liés à l’emploi pour tous les travailleurs et travailleuses à temps plein et à temps partiel;

3. un programme de création d’emplois de grande envergure pour remettre au travail des millions de Canadiens et Canadiennes sans emploi et sous-employés, pour s’assurer de réduire substantiellement le chômage et que tous les travailleurs et travailleuses puissent bénéficier des prestations d’assurance-emploi pendant toute la durée du chômage;

4. l’application de lois assurant l’équité salariale complète pour les travailleuses, la garantie de droits complets en matière de procréation et la fourniture de services universels et gratuits de garde d’enfants et d’autres services essentiels, pour que les femmes puissent jouer pleinement un rôle, sur un pied d’égalité, dans tous les aspects de la vie économique, politique et sociale;

5. la prestation de services complets, gratuits et universellement accessibles à tous les Canadiens et Canadiennes, y compris les soins de santé, l’éducation primaire, secondaire et postsecondaire, les pensions suffisantes, le logement et d’autres services de base; et

6. l’élargissement et la protection des droits des travailleurs et travailleuses à la syndicalisation, à la libre négociation collective et au droit de grève.

Le gouvernement populaire, avec le soutien actif et la mobilisation de la classe ouvrière et de ses alliés, introduirait également des réformes radicales pour renforcer le contrôle et la gestion par le peuple de l’État canadien et de ses gouvernements à tous les niveaux. La démocratisation de la vie politique et sociale devrait permettre à la classe ouvrière et aux masses du peuple canadien d’exercer un plus grand pouvoir politique et de participer pleinement à la mise en œuvre du programme populaire.

Ce gouvernement populaire permettrait aussi d’établir une nouvelle politique étrangère, indépendante, fondée sur la paix et le désarmement, et de développer des relations économiques, culturelles et diplomatiques avec tous les pays, sur la base de la pleine égalité et du respect mutuel. Il retirerait le Canada de l’OTAN et du NORAD (Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord), s’opposerait à tous les pactes militaires et aux actes d’agression et chercherait des solutions politiques pacifiques aux conflits régionaux et internationaux. Le Canada travaillerait à l’établissement de relations économiques équitables et non basées sur l’exploitation entre tous les États, à l’avancement des pays en voie de développement et à la solidarité internationale avec les peuples du monde qui luttent pour l’indépendance, la paix et le progrès social. Le Canada s’efforcerait d’éliminer le contrôle impérialiste du Conseil de sécurité de l’ONU.

L’État canadien et en particulier son appareil répressif, c’est-à-dire l’armée, les forces policières, les tribunaux et le système carcéral, serait placé sous une surveillance et un contrôle véritablement démocratique, et le Service canadien du renseignement de sécurité, la GRC (Gendarmerie royale du Canada) ainsi que le Centre de sécurité des télécommunications, tous réactionnaires et antidémocratiques, seraient démantelés. Une réorganisation aussi fondamentale contribuerait à empêcher les forces de classe hostiles d’utiliser cette partie de l’appareil d’État, pour perturber et saper les intérêts des masses laborieuses et du gouvernement populaire.

Des mesures devraient également être prises pour démocratiser les lois et les structures électorales, afin de garantir la tenue d’élections libres et équitables, par l’introduction de la représentation proportionnelle, du droit de révoquer les représentants élus et de dispositions visant à mettre fin au monopole des entreprises sur les médias de masse.

Le programme populaire devrait également inclure un appel à la réécriture de la Constitution canadienne par le biais d’une assemblée constituante. Cette nouvelle constitution devrait être soumise en vue de son approbation par les diverses composantes nationales du Canada. Elle devrait consacrer les droits démocratiques, sociaux et individuels de la personne dans la loi fondamentale du pays. Une nouvelle constitution doit parallèlement garantir les mêmes droits à toutes les nations du Canada et déclarer leur union volontaire. Les mesures visant à réduire les inégalités nationales constitueront un facteur décisif en vue de forger l’unité de la classe ouvrière et de ses alliés à travers le pays.

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De telles mesures ne sauraient constituer le socialisme, toutefois la victoire d’un gouvernement populaire consacré à la mise en œuvre d’un programme aussi ambitieux marquerait une étape importante dans la lutte pour un changement fondamental et une transformation socialiste.

Pour réussir, un gouvernement populaire devra pouvoir compter sur la mobilisation générale et consciente de la classe ouvrière de même que de ses alliés extraparlementaires. À chaque réforme importante adoptée, à chaque mesure démocratique obtenue, à chaque empiètement sur le pouvoir et les privilèges du capital, la classe dirigeante et ses partenaires internationaux impérialistes auraient pour effet de renforcer leur résistance par tous les moyens à leur disposition. Mais de telles mesures peuvent contribuer, du même coup, à galvaniser les masses et à promouvoir des actions de la classe ouvrière en soutien au gouvernement populaire.

Cette période en sera une d’intensification de la lutte de classes sur tous les fronts : politique, économique et idéologique.

La mise en œuvre réussie du programme populaire et le rythme auquel il sera exécuté dépendront de l’unité et du militantisme de la classe ouvrière et de son avant-garde révolutionnaire, ainsi que de l’unité durable de l’alliance démocratique, antimonopoliste et anti-impérialiste dans son ensemble. Les conditions régionales et internationales dominantes devront exercer également une influence sur le rythme des transformations sociales.

Tout au long de ce processus, la classe ouvrière et les forces populaires devront se mobiliser socialement et politiquement pour soutenir et mettre en œuvre le programme du gouvernement populaire, par des luttes électorales et sur les lieux de travail, des manifestations de rue et d’autres actions. Simultanément, la classe dirigeante se sentant menacée tentera d’ébranler la confiance et l’unité des forces populaires, ainsi que d’entraver leur capacité de mener à bien le programme populaire.

Pour préserver ses privilèges de classe et rétablir sa suprématie, la classe capitaliste tendra à recourir au chantage économique et au sabotage, à la subversion de l’intérieur dans les secteurs de l’appareil d’État sur lesquels elle continue d’exercer une influence et un contrôle, à la violence politique et au terrorisme, voire à la rébellion ouverte et à l’intervention étrangère. Le gouvernement populaire, grâce au soutien inconditionnel de la classe ouvrière, sera tout à fait en droit de contrer de telles attaques antidémocratiques et illégales contre le pouvoir populaire.

La classe ouvrière, agissant de concert avec ses alliés, indirectement par son gouvernement élu, mais aussi, plus directement, sur les lieux de production dans les usines et les bureaux, de même qu’au sein des communautés, devra élargir et approfondir progressivement le contenu de ce programme populaire. Des réformes plus radicales devront être mises en œuvre, pour réduire le pouvoir du capital au moyen de mesures progressistes telles que la nationalisation d’entreprises ou le contrôle des investissements et des devises.

Au fur et à mesure que la classe ouvrière et ses forces politiques gagneront en expérience et en confiance, et que les changements sociaux et économiques modifieront progressivement l’équilibre des forces de classes au sein de la société, des conditions révolutionnaires s’établiront. L’option socialiste avancée par le Parti communiste recueillera alors un large soutien.

La transformation révolutionnaire vers le socialisme marquera le transfert absolu du pouvoir de la classe capitaliste à la classe ouvrière et à ses alliés. Ce processus devra subir l’influence à la fois des conditions et des évènements nationaux et internationaux. Le rythme et les caractéristiques de cette transformation dépendront de l’unité et de la détermination de la classe ouvrière et de ses alliés les plus proches aux moments décisifs, ainsi que de la capacité des forces progressistes et révolutionnaires à contrecarrer et à limiter les activités contre-révolutionnaires qui violent la démocratie et la primauté du droit.