Pour les communistes, le dépôt d’un budget ne représente pas seulement un exercice financier, mais plutôt une profession de foi politique. En conséquence, le Parti communiste du Québec (PCQ-PCC) s’inquiète du budget pour l’année à venir déposé par la CAQ le 12 mars dernier.

Écrit à l’encre rouge, ce dernier est pourtant loin de satisfaire les besoins de la classe ouvrière, des travailleurs et des masses populaires. Au contraire, il augure une nouvelle ronde d’austérité sans doute plus violente que la dernière.

Faits saillants

Des dires du ministre Girard, ce budget présente un déficit historique, sans doute le plus élevé en matière de dollars. On parle en effet de 11 milliards au total, desquels 2,2 (soit 20%) est affecté au fonds des générations

En matière d’éducation, une augmentation de 7,6% est prévue, ce qui couvre à peine plus que les besoins nécessaires à maintenir les services actuels déjà déficients.

Dans le domaine de la santé et des services sociaux, on parle de 4,4% d’augmentation sur trois ans, ce qui non seulement tranche avec la moyenne de 7,3% des dernières années, mais continue de s’éloigner des cibles nécessaires afin de garantir un service de santé public dont l’investissement continue de pâtir de décennies de coupes et de casse qui se sont manifestées lors de la COVID19.

Côté logement, aucun argent neuf n’est mis sur la table : alors qu’il faudrait construire en urgence au moins 50 000 logements sociaux, dans une crise du logement sans précédent, le budget ne prévoit que de plancher sur son projet d’en bâtir 8000, tel que promis lors de la mise à jour économique de l’automne dernier.

Dans la culture, on calcule une coupe de 67,4 millions de dollars tandis que la complétion du réseau des garderies prévues pour 2025 est remise aux calendes grecques – avec un effet néfaste pour les travailleuses d’ailleurs.

Le transport collectif est également lésé par ce budget qui ne lui accorde que 2,9% à mettre en relation avec les 10% d’augmentation pour les infrastructures routières. Selon la mairesse Valérie Plante, il s’agit d’une compression de 400 millions de dollars…

Bref, tous les mouvements démocratiques, ouvriers et syndical s’entendent pour qualifier ce budget d’insuffisant. Ils n’ont pas tort : aucune réponse aux problèmes qui affligent la classe ouvrière et les masses populaires québécoises n’y trouvent réponse.

D’où vient le déficit?

Pour le gouvernement, le déficit est induit à la fois par un ralentissement économique et par une hausse des dépenses attribuables aux nouvelles conventions collectives conquises par les salariés à l’automne dernier.

Foutaise!

Il résulte en fait des milliards de dollars perdus en niches fiscales des dernières années, de la braderie de nos entreprises et infrastructures publiques. Qu’il s’agisse d’Airbus, d’Hydro-Québec, du REM, le schéma est le même : privatisation des profits et socialisation des pertes, notamment à travers la Caisse de dépôts et placements qui en est une cheville ouvrière.

La part des impôts corporatifs dans les revenus du budget 2024 se somme à 869 millions de dollars, soit à peine 6% des revenus. En 2021, cette part s’élevait à 11% ce qui, aujourd’hui, représenterait 1,65 milliards de dollars… Pour rappel, les subventions à la seule Northvolt se somment à 1,5 milliards de dollars!

De même, 2,7 milliards de dollars sont perdus en allègements fiscaux, soit l’équivalent de 31% du budget.

Le Fonds des générations, une usine à gaz

Une part non négligeable du déficit est attribuable au Fonds des générations. Mécanisme créé par le gouvernement Charest en 2006 dans le but officiel de réduire le fardeau de la dette, il s’agit en fait d’une fiducie où chaque année, les gouvernements successifs immobilisent de l’argent plutôt que de l’investir dans des dépenses sociales ou structurantes économiquement.

Il s’agit donc d’un actif économique et non d’un passif : son montant devrait d’abord être inscrit dans la colonne des revenus et non des dépenses. D’autre part, il s’agit d’une véritable usine à gaz puisqu’il n’est qu’un autre truchement par lequel des liquidités publiques sont investies sur les marchés financiers, ceux-là même qui spéculent sur les titres… de la dette!

L’austérité déguisée

L’austérité, ou rigueur budgétaire, ce n’est pas seulement lorsque le gouvernement décide de couper dans les dépenses publiques. C’est aussi et surtout lorsqu’il ne se donne pas les moyens de répondre aux besoins de la population et préfère intensifier les remises d’argent du travail vers le capital.

Le budget présenté en 2024 suit cette directive à la lettre. Le gouvernement Legault force un déficit qui n’aurait pas lieu d’être. Il se sert du budget comme d’une arme de chantage politique pour paver la voie soit pour lui, soit pour les gouvernements qui lui succèderont, afin d’accentuer la casse de nos services publics, puis d’intensifier les attaques contre nos conditions de travail et nos salaires.

Contrairement à ce que prétendent les économistes à la botte des monopoles, le Québec ne manque pas de marge de manœuvre. Comme le dit le slogan : « de l’argent, il y en a, dans les poches du patronat ». Il suffit d’aller le chercher notamment à travers une assiette fiscale réellement progressive, l’augmentation des impôts corporatifs et un vaste chantier de nationalisations.

Or, la CAQ fait tout l’inverse : en différé, elle presse le citron encore plus. Car il serait naïf de croire que le poids du déficit est le même pour les travailleur-euses que pour la classe dirigeante. À l’inverse : s’il y a déficit, c’est précisément pour renflouer les monopoles, d’autant plus que ces derniers achètent des titres de la dette à prix fort compte-tenu de la hausse des taux d’intérêt…

Ainsi, d’une façon ou d’une autre, ce sont les masses populaires et la classe ouvrière qui porteront le fardeau de ce déficit.