Pour que les Canadiens et Canadiennes puissent exercer un véritable pouvoir populaire sur la vie collective du pays, ils doivent contrôler l’économie canadienne. La démocratie exige donc l’instauration du socialisme, c’est-à-dire la socialisation des machines, des matières premières et des autres moyens de production nécessaires à la vie humaine et à son amélioration.
Le socialisme devra se développer dans notre pays selon les orientations démocratiquement établies par la classe ouvrière et ses alliés. Il devra avoir des caractéristiques uniques qui refléteront l’histoire et le niveau de développement actuel du Canada, ainsi que la richesse et la diversité de ses cultures et de ses traditions sociales. Le socialisme devra suivre son propre rythme et avoir son propre contenu, en fonction du développement planifié, équilibré et proportionné de l’économie par la propriété publique des moyens de production. Il n’existe ni modèle universel de socialisme, ni calendrier ou échéancier préétabli à suivre pour son développement.
Mais le socialisme n’a pas à être réinventé à partir de zéro. Toutefois, il faudra tenir compte des importantes leçons tant positives que négatives sur la construction du socialisme, tirées des expériences de nombreux pays au cours du siècle dernier. Ces expériences et ces leçons devront éventuellement être appliquées avec créativité à la construction du socialisme au Canada.
Malgré les revers du processus révolutionnaire, nous vivons actuellement à l’époque historique de la transition du capitalisme au socialisme, et ce, à l’échelle mondiale, un processus dans lequel la classe ouvrière joue un rôle central et de plus en plus prépondérant dans la promotion des transformations démocratiques, progressistes et révolutionnaires.
L’expérience soviétique
Il est particulièrement important d’évaluer les expériences du développement du socialisme dans le premier État ouvrier au monde, c’est-à-dire l’Union soviétique, et d’en tirer certaines leçons, afin de mieux comprendre pourquoi le socialisme y a été renversé, et le capitalisme restauré, après plus de soixante-dix ans. Cette question exige une réflexion et des discussions des plus approfondies, et ce, pour deux raisons. D’une part, comprendre à la fois les grandes réalisations du peuple soviétique et les causes externes et internes responsables de leur sérieux revers peut aider les Canadiens et Canadiennes à construire le socialisme, tout en évitant de répéter ce qui n’a pas fonctionné. D’autre part, la défaite du socialisme en URSS est une arme idéologique puissante entre les mains du capitalisme monopoliste, utilisée pour convaincre les travailleurs, les travailleuses et les progressistes que le socialisme ne fonctionne pas. En niant le socialisme comme solution de rechange révolutionnaire au capitalisme, les grandes entreprises cherchent à décourager les travailleurs et travailleuses, à affaiblir leur lutte de classe et à les amener plutôt à s’accommoder de l’ordre capitaliste dominant.
Nous rejetons l’idée bourgeoise selon laquelle le socialisme serait un échec et qu’il ne constituerait en soi qu’une solution de rechange médiocre et inapplicable au remplacement du capitalisme. Le socialisme a été affaibli, puis finalement écrasé en URSS (et dans d’autres anciens pays socialistes), en raison d’une combinaison complexe de circonstances et de contradictions internes et externes étroitement liées les unes aux autres, qui ont abouti à sa défaite et à la victoire temporaire de la contre-révolution.
La révolution socialiste d’Octobre 1917 en Russie marque une véritable ère nouvelle dans le développement humain et social. Pour la première fois dans l’Histoire, des travailleurs et travailleuses entreprenaient de construire une nouvelle société libérée de l’exploitation et de l’oppression. L’Union soviétique a réalisé de nombreuses grandes avancées sociales, en éliminant le chômage, l’analphabétisme, la famine, l’itinérance et la profonde aliénation. Le socialisme en Union soviétique a transformé un pays économiquement et culturellement « arriéré » en l’une des principales puissances mondiales, et a fait d’énormes progrès dans les domaines de la culture et de la science.
Ces réalisations étaient d’autant plus remarquables, compte tenu des pressions impérialistes incessantes exercées sur l’URSS tout au long de son histoire. Dans leurs efforts inlassables pour écraser le socialisme, les puissances impérialistes ont entrepris à deux reprises des invasions militaires directes (le Canada ayant participé à la première). Ces puissances avaient appliqué des sanctions économiques sévères et précipité une course aux armements nucléaires extrêmement couteuse et dangereuse afin de saigner à blanc l’URSS, tout en menant une guerre idéologique et de propagande prolongée, et en recourant à la subversion et au sabotage purs et simples.
Sur le plan international, l’Union soviétique a joué un rôle décisif dans la défaite du fascisme européen pendant la Seconde Guerre mondiale, défendu la cause de la décolonisation, soutenu les mouvements de libération dans tout le tiers monde et fourni une aide vitale aux nouveaux États émergents. Sa politique de paix a également contribué à limiter, sans toutefois y mettre fin totalement, la tendance de l’impérialisme à l’agression militaire.
Le socialisme a également profité à la classe ouvrière dans les pays capitalistes avancés, en renforçant considérablement la pression sur les classes dominantes pour qu’elles accordent des concessions substantielles aux classes laborieuses sous la forme de droits des travailleurs, de la semaine de travail de quarante heures, de l’assurance-emploi, des droits des femmes, des soins de santé, de l’éducation publique et des pensions de retraite.
Les causes internes de la crise et de la défaite du socialisme en Union soviétique n’étaient pas ancrées dans la nature même du socialisme, mais consistaient plutôt en une déformation, allant jusqu’à s’éloigner carrément de la théorie et de la pratique socialistes. Ces déviations sont, en partie, attribuables aux conditions extrêmement difficiles dans lesquelles se construisait alors le socialisme.
La Russie prérévolutionnaire était un vaste pays, mais économiquement sous-développé. Elle possédait une immense population paysanne, mais une classe ouvrière relativement petite. La pauvreté et l’analphabétisme y sévissaient. La Première Guerre mondiale et la guerre civile qui s’ensuivit ont aggravé les conditions auxquelles était confrontée la jeune république soviétique. Par ailleurs, en raison de l’hostilité acharnée de l’impérialisme — notamment de l’Allemagne nazie, qui a envahi le pays en 1941 —, une industrialisation moderne a dû être mise en place à un rythme effréné.
Dans une large mesure, les conditions objectives défavorables ont forcé le gouvernement soviétique à accélérer la transformation socialiste de la vie économique et sociale, en sautant rapidement de nombreuses étapes de transition dans la construction du socialisme, ce qui aurait permis un processus de développement beaucoup plus équilibré. L’une des graves erreurs a été de ne pas conserver le caractère indépendant des syndicats soviétiques en tant qu’organisations d’autodéfense des travailleurs et travailleuses soviétiques.
C’est dans ces conditions que le Parti communiste de l’Union soviétique a dû assumer pleinement la tâche de représenter le rôle dirigeant de la classe ouvrière. La classe ouvrière soviétique elle-même ayant été frappée et massivement décimée par les deux guerres brutalement destructrices menées sur le sol soviétique, de nouveaux travailleurs inexpérimentés ont été recrutés dans les campagnes pour remplacer ceux tombés au combat et combler les postes administratifs laissés vacants. Cela explique en partie, mais ne justifie pas la façon dont les activités du Parti se sont progressivement fusionnées avec les fonctions de l’État, en particulier avec l’appareil administratif et bureaucratique qui a dû nécessairement se mettre en place pour centraliser et contrôler étroitement les ressources rares et épuisées du pays. Ces conditions difficiles ne justifient pas non plus les graves violations de la légalité socialiste, les purges et les crimes graves commis contre des personnes innocentes.
Une planification économique centralisée a permis pendant plusieurs décennies d’obtenir d’importants succès économiques. Ce n’est pas la planification, en tant que telle, qui a miné la capacité des sociétés socialistes à maitriser la révolution scientifique et technologique, mais plutôt des rigidités étouffantes ainsi qu’une myriade d’autres déviations des principes de la construction socialiste, combinées à des pressions impérialistes externes. En conséquence, l’URSS et d’autres pays socialistes avaient pris un dangereux retard sur les pays capitalistes développés quant à la productivité du travail et le niveau de vie matériel. Cela a entrainé des conséquences déstabilisatrices.
Le Parti lui-même s’était intégré davantage dans l’administration de l’État. Les fonctions assumées par les soviets élus (conseils populaires) sont devenues chaque fois plus formelles. Un véritable gouvernement populaire, ouvert à la critique, avait cédé la place à la bureaucratie et à l’autoritarisme. Au fil du temps, c’est la relation politique entre le Parti et la classe ouvrière, de même que le peuple dans son ensemble, qui en a souffert. La démocratie interne du Parti s’était également érodée, trop souvent remplacée en son sein par le carriérisme et l’opportunisme.
Si des progrès considérables ont pu être accomplis dans l’amélioration des conditions des femmes soviétiques, particulièrement au travail, en revanche, certains agissements dépassant les limites du sexisme entravant l’émancipation des femmes ont toutefois été autorisés sans remise en question.
Tous ces éléments négatifs, qui reflétaient une dégénérescence du rôle central de la démocratie socialiste dans la construction d’un État ouvrier, ont eu pour conséquence de retarder le développement du rôle politique dirigeant de la classe ouvrière et de ses alliés, dans la transformation et la construction d’une nouvelle société socialiste. En effet, les atteintes à la démocratie et à la légalité socialistes ont joué un rôle important dans la diminution de la participation du peuple au sein du gouvernement et de l’État, et ont conduit à un cynisme généralisé et à l’aliénation sociale.
Une sclérose dogmatique de la théorie minait aussi de plus en plus la dynamique du Parti, empêchant une véritable analyse des conditions et des problèmes concrets dans la construction du socialisme. De graves erreurs théoriques ont conduit : à porter un jugement erroné sur la situation internationale, à sous-estimer la capacité de résilience du capitalisme, à proclamer l’irréversibilité des acquis du socialisme et à se fier à un équilibre militaire des forces entre le socialisme et le capitalisme, ainsi qu’à des erreurs et à un manque de sensibilité. Par exemple, la question nationale a été proclamée comme étant entièrement « résolue », et le socialisme a pratiquement été déclaré comme ayant éliminé la nécessité de toute préoccupation écologique. La mise au banc des débats publics et des discussions au sein du Parti, autour de ces questions, a nui à la politique étrangère et nationale résultant de ces erreurs. La conséquence la plus grave de la stagnation de la théorie marxiste-léniniste a été l’affaiblissement du Parti lui-même, y compris sa capacité à reconnaitre et à combattre la montée de l’idéologie bourgeoise, réformiste et ouvertement contre-révolutionnaire, autant en son sein qu’au-delà de ses propres rangs.
Ce sont ces facteurs, internes et externes, qui ont permis aux forces opportunistes et contre-révolutionnaires de prendre le dessus au sein de la direction du Parti pour, finalement, provoquer l’effondrement du système soviétique et, avec lui, des autres États socialistes d’Europe. Depuis l’effondrement du socialisme, les masses laborieuses de ces anciens pays socialistes ont été confrontées à la privatisation massive et au vol de la propriété sociale, au chômage de masse et à la pauvreté, à la détérioration considérable de l’éducation, des soins de santé et d’autres droits sociaux, à la montée du crime organisé et de la corruption, de même qu’à la montée de la haine ethnique et raciale.
La construction du socialisme et de l’État socialiste au Canada
Contrairement aux conditions qui prévalaient dans les premières années de l’ancienne Union soviétique ou dans d’autres pays, le socialisme au Canada devra se construire sur une base économique et technique hautement développée, grâce à une classe ouvrière hautement qualifiée et instruite, une infrastructure développée, d’abondantes ressources naturelles et une grande variété d’industries secondaires et tertiaires. Ces conditions, combinées aux leçons — tant positives que négatives — que l’on peut tirer des expériences socialistes antérieures, seront susceptibles de fournir une base solide pour la construction d’un Canada socialiste.
Construire le socialisme exige l’établissement d’un État de type nouveau, c’est-à-dire socialiste, dirigé par la classe ouvrière et ses alliés. Un État socialiste est essentiel pour planifier et organiser la production et la distribution, pour briser le pouvoir de la classe capitaliste, pour étendre la démocratie afin que la force créatrice des masses laborieuses se tourne vers la construction d’une société nouvelle et socialiste, et ainsi empêcher la restauration contre-révolutionnaire du capitalisme.
De nombreuses preuves historiques montrent que les forces capitalistes réactionnaires ne cèderont pas volontairement leur pouvoir et leurs privilèges. Ils tenteront de mettre fin au processus démocratique. Le danger de violence capitaliste contre l’État socialiste et la volonté exprimée par la majorité du peuple est inévitable : on ne saurait l’ignorer, car les conséquences seraient extrêmement graves. Une fois le pouvoir socialiste instauré, la classe ouvrière et ses alliés seront justifiés d’utiliser le pouvoir et l’autorité de l’État pour protéger la volonté démocratique de la majorité contre la minorité, qui s’efforcera de reprendre les positions perdues. La nature des lois et des mesures adoptées pour protéger le pouvoir de la classe ouvrière dépendra du degré de résistance que les éléments capitalistes réactionnaires opposeront à la loi et à l’ordre socialiste.
La transition pacifique vers le socialisme, qui est souhaitable, dépend non seulement de la volonté du peuple, mais aussi du rapport des forces du moment. Pour résister et mettre fin à la violence capitaliste et à la réaction politique, il sera crucial de développer l’unité maximale et de concentrer tous ses efforts sur les objectifs du peuple, la participation unie des masses les plus larges de la classe ouvrière à la lutte politique et la formation de l’unité avec les petits producteurs (agriculteurs, pêcheurs et artisans) et les couches moyennes de la population. La classe ouvrière doit être prête à utiliser toutes les formes de lutte pour combattre l’inévitable résistance du capital au progrès social.
Cependant, pour la première fois dans l’histoire du Canada, ce sera la majorité du peuple qui dirigera le pays et établira une véritable démocratie. La dictature du capital sur le travail, c’est-à-dire la domination de la minorité sur la majorité, sera abolie et remplacée par une démocratie socialiste dans laquelle le pouvoir politique sera exercé par la classe ouvrière et ses alliés. Pour la première fois, ce seront les intérêts du peuple canadien qui prévaudront dans notre vie économique, politique et culturelle.
Quelle que soit la forme qu’il prendra, l’État socialiste, du point de vue de son essence de classe, devra représenter le pouvoir de la classe ouvrière. C’est ce que Marx appelait « la dictature du prolétariat ». Concrètement, le pouvoir de l’État sera exercé par la grande majorité de la population canadienne sur l’ancienne minorité capitaliste.
La transformation socialiste
La vie politique de l’État socialiste sera plus profondément démocratique que tout ce qui est réalisable sous le capitalisme. Des millions de travailleurs et travailleuses participeront à l’administration des affaires du pays.
Afin d’établir l’unité la plus large possible pour la construction d’un Canada socialiste, notre parti préconise un accord sur un programme commun de tous les partis politiques et organisations populaires, qui reconnaissent la nécessité d’une transformation sociale révolutionnaire et le rôle de premier plan que doit jouer la classe ouvrière.
Bien qu’il soit impossible de savoir avec certitude la forme exacte que prendrait un Canada socialiste, notre Parti prévoit qu’un tel État socialiste devra avoir les caractéristiques suivantes :
Notre Parti prône la formation d’un gouvernement multipartite des forces politiques qui s’entendraient sur la réalisation et la construction d’une société socialiste. Dans un tel gouvernement multipartite, tous les partis désireux de participer à la construction du socialisme devront apporter leur contribution. Simultanément, les partis d’opposition pourraient également apporter une contribution positive, à condition toutefois de respecter les lois et la constitution socialiste.
Bien que le capitalisme prépare les conditions matérielles au socialisme, ce dernier ne se développera pas spontanément, mais devra se construire par une lutte prolongée contre l’ancien système et pour le nouveau. Dès sa création, l’État ouvrier entreprendra la tâche d’organiser et de diriger, étape par étape, la transition du Canada vers le socialisme.
On ne saurait dire, aujourd’hui, par quelles étapes ce processus historique devra passer, ou qu’il ne comportera que des avancées et non des reculs. Le rythme auquel la construction du socialisme peut se poursuivre dépendra de la volonté démocratique et de la lutte de classe menée par les travailleurs et travailleuses canadiens et le peuple en général, de la force de la résistance opposée par les exploiteurs capitalistes, ainsi que du contexte international.
Le gouvernement socialiste devra remplacer l’ancien État capitaliste par un nouvel État socialiste. Afin de réorganiser l’économie et la société canadiennes en général dans l’intérêt des masses laborieuses, il aura le devoir d’appliquer la Constitution et les lois de la République socialiste du Canada, de maintenir le pouvoir populaire et de protéger la propriété socialiste ainsi que les droits et les biens personnels des personnes.
Les droits du peuple devront être proclamés et les moyens permettant à chacun de les exercer seront fournis. Les nouvelles technologies permettront de réduire la bureaucratie et l’arrogance des autorités dans les opérations gouvernementales et sur le lieu de travail.
La liberté d’expression, de presse, d’association et de réunion sera garantie par la Constitution. Les moyens de communication de masse seront mis à la disposition des masses laborieuses et de leurs organisations. L’Église et l’État, de même que l’Église et l’école seront séparés. Les gens auront le droit d’avoir, de pratiquer et de défendre des opinions religieuses ou non. Les droits civils fondamentaux, y compris l’interdiction d’arrestations et d’actions arbitraires de la police, l’accès de tous les citoyens et citoyennes aux tribunaux, l’habeas corpus et le procès devant jury seront inscrits dans les lois et dans la Constitution. Le pouvoir judiciaire devra respecter la Constitution et la législation de l’État socialiste et protéger les droits individuels, y compris le droit à la vie privée.
Le gouvernement socialiste devra décréter la socialisation des secteurs financier et industriel de l’économie, des terres et des ressources, ainsi que des transports et des communications.
Le fonctionnement de l’économie exigera que les petites et moyennes entreprises non marchandes continuent de fonctionner, pendant un certain temps dans le cadre du plan économique général, sous diverses formes de propriété et de production, selon les conditions établies par le gouvernement socialiste. En plus des entreprises d’État et des entreprises privées, il y aura des coopératives de producteurs et de consommateurs et, si les conditions le justifient, des entreprises mixtes, c’est-à-dire à capitaux publics et privés.
La propriété individuelle des masses laborieuses sur leurs biens personnels, y compris le droit de posséder une maison et un chalet, un fonds de pension, des épargnes et des polices d’assurance leur seront garanties. Le peuple canadien devra décider lui-même, à la lumière des circonstances, de toute compensation à verser aux grands capitalistes pour leurs biens expropriés.
La planification socialiste de l’économie, utilisant les dernières avancées scientifiques et technologiques et s’appuyant sur les capacités créatrices des masses laborieuses, permettra d’assurer le plein emploi et de mettre fin aux disparités régionales à travers le Canada. Les programmes sociaux seront progressivement étendus de façon à remplacer davantage les produits de consommation privée qui, pour le moment, ne sont plus accessibles qu’en échange d’un prix. Par conséquent, le rôle du marché dans la société canadienne sera graduellement réduit et remplacé par une production pour l’usage. Les avantages des nouvelles technologies et d’une augmentation de la productivité serviront à réduire les heures de travail et les tâches physiquement pénibles, tout en permettant aux masses laborieuses de consacrer plus de temps à des loisirs éducatifs et à des activités culturelles.
La production sera planifiée pour répondre aux besoins matériels et culturels changeants de la population, tout en stoppant et en inversant la dégradation et la destruction de l’environnement causées par le capitalisme. Les besoins en matière d’environnement au Canada et dans le monde seront respectés, et les stratégies de développement seront choisies de façon à réduire au minimum l’épuisement des ressources. La production peut être planifiée de façon à satisfaire les besoins de la population, sans faire la promotion de la surconsommation axée sur le profit qui accompagne la pauvreté de masses dans le monde d’aujourd’hui. Une économie socialiste devra créer les conditions nécessaires pour mettre pleinement en œuvre l’utilisation prudente et efficace des ressources naturelles, ainsi qu’une gestion planifiée de l’environnement, mais la vigilance et le contrôle devront néanmoins se faire en permanence.
En supprimant le lourd tribut exigé par la classe capitaliste sous la forme du profit, de la rente et de l’intérêt, de même que de la spéculation parasitaire, et en éliminant les énormes gaspillages qu’entrainent la production militaire et les guerres, les crises économiques, la surproduction, l’obsolescence programmée des biens de consommation, le chômage, la rivalité acharnée et la publicité concurrentielle, l’État socialiste mettra à la disposition de la société d’énormes quantités de ressources auparavant gaspillées.
Sous le socialisme, la création de richesse sociale n’a qu’un seul objectif : servir les intérêts du peuple, en élevant le niveau de vie, en améliorant et en étendant les services sociaux et en libérant les forces culturelles actuellement étouffées par la domination des grandes entreprises.
Sécurité, liberté et progrès humain
Une fois instauré, le socialisme garantira, en vertu de la loi, le droit à un emploi à tous les Canadiens et Canadiennes. Les salaires seront payés en fonction de la quantité et de la qualité du travail effectué, ainsi que du niveau de compétence atteint.
Comme l’industrie appartiendra aux masses laborieuses, la bourgeoisie disparaitra en tant que classe. Par conséquent, les conditions seront ainsi créées pour mettre fin au conflit entre le travail et le capital. De nouveaux rapports sociaux, à caractère socialiste, verront le jour, dans lesquels les intérêts des travailleurs et travailleuses, des ingénieurs, des scientifiques et des gestionnaires seront harmonisés.
Parallèlement au fonctionnement d’un État populaire révolutionnaire, la démocratie canadienne devra reposer toujours plus sur les institutions non gouvernementales du peuple. Sous le socialisme, les syndicats auront non seulement les droits dont ils ont besoin pour fonctionner dans une économie capitaliste — se syndiquer librement, négocier et faire la grève —, mais ils pourront également participer aux processus gouvernementaux et prendre une part active à la gestion du processus de production et des organismes de planification sur le lieu de travail, et ce, à l’échelle régionale, provinciale et nationale partout au Canada. Les droits des travailleurs et travailleuses seront garantis par la Constitution. Les syndicats devront conclure des conventions collectives avec l’industrie socialiste, en augmentant progressivement les salaires, en réduisant les heures de travail et en améliorant les conditions de travail. Soutenus par les tribunaux, ils auront le pouvoir de faire appliquer les Lois sur la santé et la sécurité au travail, de gérer l’assurance sociale et l’assurance maladie, de même que de superviser les mesures relatives à la santé mentale et physique des travailleurs et travailleuses.
Les agriculteurs et agricultrices se verront garantir la sécurité d’occupation des terres qu’ils cultivent en vertu de la loi, et seront libérés du fardeau de la dette imposé par les monopoles financiers et industriels. Les coopératives de commercialisation des agriculteurs et agricultrices seront un moyen d’échange entre la ville et la campagne. Là où il est possible de réaliser des économies d’échelle en regroupant de petites exploitations agricoles en coopératives de production, l’État socialiste, par le biais de prêts abordables et d’autres moyens, facilitera ce processus pour les agriculteurs et agricultrices intéressés.
L’État socialiste encouragera le développement des sciences et des technologies, de programmes accessibles et inclusifs pour les sports amateurs et l’exercice physique, et d’une culture populaire démocratique. Un soutien de l’État stimulera le processus créatif et créera les conditions nécessaires à l’épanouissement des arts. La liberté d’expression artistique sera garantie par la Constitution.
Les conditions matérielles permettant de mettre complètement fin aux diverses formes d’oppression fondée sur le sexe seront fournies sous le socialisme. Il sera important pour la société socialiste de valoriser pleinement toutes les contributions sociales et économiques des femmes, d’assurer l’égalité des sexes en matière de travail rémunéré et non rémunéré, et de faire en sorte que l’égalité entre les hommes et les femmes imprègne tous les aspects de la vie. La société socialiste permettra d’éliminer la pauvreté. Les soins aux enfants, aux malades et aux personnes âgées ne doivent plus incomber uniquement aux femmes, mais à tous les adultes, et des services de garde d’enfants de haute qualité doivent être accessibles à tous les travailleurs et travailleuses. L’égalité des sexes signifie également une tolérance zéro pour la violence à l’égard des femmes, des personnes trans et non binaires, sous quelque forme que ce soit. Un ferme engagement en faveur de la solidarité entre les hommes et les femmes est nécessaire à la création et au maintien d’un Canada socialiste. L’éradication des inégalités entre les genres sera cruciale pour passer carrément outre du capitalisme à un stade supérieur de la société.
Une société socialiste devra protéger les droits des enfants et des jeunes. L’accès à l’éducation sera offert à tous et à toutes dans un système éducatif public, entièrement démocratisé et gratuit, et ce, à tous les niveaux. Les droits de scolarité et le matériel d’apprentissage seront gratuits, et les étudiants des établissements d’enseignement postsecondaire recevront des allocations de subsistance. Une formation professionnelle sera dispensée aux jeunes.
Le peuple sera libéré du grand fardeau de l’insécurité. Des services sociaux complets seront fournis. L’accès à des soins de santé de qualité sera garanti. Des services de garde d’enfants de haute qualité et une aide à l’éducation des enfants seront fournis. Les personnes âgées auront accès à une gamme complète de services sociaux. Dans un Canada socialiste, personne ne mourra de faim et ne sera sans abri. Le droit de la famille supprimera le concept patriarcal de privilège pour la famille nucléaire hétérosexuelle, et reconnaitra pleinement la variété des formes familiales et des orientations sexuelles.
Le socialisme crée les conditions d’une solution fondamentale et pleinement démocratique de la question nationale. La Constitution d’un Canada socialiste, fermement fondée sur le principe du droit des nations à l’autodétermination, devra garantir l’union volontaire de nations libres et égales. Les droits des minorités nationales et des groupes ethniques, qui sont essentiels, seront garantis par la Constitution.
Un Canada socialiste devra corriger les injustices historiques et actuelles dont les peuples autochtones ont été victimes, tout en leur fournissant une assistance complète à la promotion de leurs droits et aspirations nationaux. Les peuples autochtones devront atteindre la pleine et entière égalité dans tous les aspects de la vie, car tous les vestiges du racisme et de la discrimination seront éliminés. La propriété coopérative et publique permettra aux communautés autochtones de mettre fin à l’exploitation de classe. Une aide économique et d’autres formes d’assistance seront nécessaires, pour que les peuples autochtones puissent protéger et développer leurs langues, leurs cultures et leurs valeurs. Les droits des peuples autochtones seront expressément énoncés dans la Constitution socialiste.
Les droits collectifs seront protégés et mis en valeur de manière à garantir également les droits individuels essentiels des Canadiens et Canadiennes. Il faut avant tout protéger le droit à la prise de décisions démocratiques et le droit à la dissidence légitime.
La Constitution devra déclarer que tout pouvoir émane du peuple et est exercé à tous les niveaux de gouvernement par l’intermédiaire de leurs représentants et représentantes élus. Le droit de révocation de ces derniers par les électeurs et électrices, le droit d’accès à l’information et le droit de pétition et de critique à l’égard du gouvernement ou de tout autre organe de celui-ci doivent prévaloir. Par l’intermédiaire des organes élus du gouvernement et des syndicats, des comités d’usine, des organisations agricoles, communautaires et professionnelles, les masses populaires devront participer à l’administration du Canada d’une façon nouvelle et plus démocratique que jamais auparavant. Une armée populaire et une milice populaire seront formées pour le maintien de la loi et de l’ordre sous le socialisme et pour assurer la défense du pays.
Les relations du Canada avec tous les autres pays devront être régies par des principes d’égalité, de paix, d’amitié, de diplomatie ouverte, d’échanges culturels et scientifiques et de commerce à des conditions mutuellement avantageuses.
Il sera illégal de pratiquer ou de préconiser le mauvais traitement ou la discrimination fondée sur l’origine nationale, ethnique ou autochtone, le genre, la racialisation, l’âge, le handicap, l’orientation sexuelle ou la religion.
Le socialisme créera de nouvelles relations sociales et économiques fondées sur l’égalité. L’exploitation d’une classe de personnes par une autre sera abolie, la condition essentielle à la construction d’une nouvelle société dans laquelle les droits de la personne seront garantis.
Non seulement le socialisme modifiera radicalement les institutions fondamentales de la société, mais il créera les conditions d’un développement libre et sans entrave de l’humanité dans son ensemble. En s’appuyant sur la capacité des êtres humains d’utiliser leur intelligence pratique et d’offrir leur solidarité bienveillante, comme ils l’ont toujours fait dans une certaine mesure, même dans les conditions les plus défavorables, avec le temps, le socialisme finira par changer le ton des relations quotidiennes des gens entre eux. Le peuple commencera à prendre en charge toujours plus directement ses affaires de façon collective. Le travail lui-même, pour reprendre les mots de Marx, « ne sera pas seulement un moyen de vivre, mais sera devenu le premier besoin vital ». Les gens auront tendance à devenir moins passifs et moins compétitifs sur le plan social, et à avoir un esprit plus critique et coopératif.
Avec le temps, un nouveau peuple verra le jour, libéré de l’intolérance et des préjugés, élevé dans un climat d’humanité et d’amitié. Le travail créatif pour le bien de la société et des personnes sera l’une des caractéristiques des citoyens et citoyennes d’une communauté socialiste canadienne. Ils devront instaurer la société communiste dont l’humanité rêve depuis des siècles : c’est-à-dire une société sans classes, fondée sur une abondance de richesses matérielles et spirituelles, dans laquelle l’État devra disparaitre et où chacun devra contribuer selon ses capacités et recevoir selon ses besoins.