Le Parti communiste du Québec salue le courage et la détermination des enseignant-es et des travailleur-euses de la santé syndiqués au sein de la CSQ qui ont voté à 73% en faveur d’un mandat de grève de cinq jours « au moment opportun ». Ce vote est d’autant plus courageux qu’il tranche avec l’immobilisme ambiant des directions syndicales qui se contentent d’actions en demi-teinte et rechignent à s’engager dans des actions plus musclées à la fois contre les fins de non-recevoir qu’oppose le gouvernement Legault dans le cadre des négociations du secteur public, mais aussi contre la détérioration des conditions de travail dans les services publics, notamment dans les secteurs de la santé et de l’éducation.
Cette grève n’est pas seulement motivée par la stagnation des négociations avec le gouvernement. Elle est également motivée par des difficultés liées à la COVID19, par les mesures inadéquates et insuffisantes, par le manque d’appui dont sont victimes nos enseignant-es et travailleur-euses de la santé. Éreinté-es, surchargé-es, à bout de nerfs, on apprenait récemment que le nombre de ceux et celles qui abandonnent leur emploi atteint un niveau historiquement élevé.
Depuis le début de la pandémie de COVID19, les écoles comptent pour l’un des foyers les plus importants d’éclosion de COVID19. Pourtant, elles restent ouvertes au cours de ce deuxième confinement et on demande aux enseignant-es de faire comme si de rien était. Pis encore, on leur demande de s’ajuster à la situation sans aucune formation, dans le même temps imparti que s’il s’agissait d’une année normale tandis que tous les ajustements qu’on leur demande requièrent, selon Josée Scalabrini, Présidente de la FSE-CSQ, trois fois plus de préparation.
Dans le réseau de la santé, on constate une vague de départs sans précédent (dont près de 30% des 10 000 préposé-es aux bénéficiaires formés en accéléré), également motivée par des conditions de travail intenables marquées entre autres par la suspension, depuis le 21 mars dernier, des conventions collectives sous prétexte de la pandémie. Clairement, on fait peser le fardeau de la casse de notre service de santé sur les travailleur-euses qui en plus, doivent composer avec l’anxiété de contracter éventuellement la COVID19 et de la transmettre à leurs proches.
Les décennies de coupes dans le financement de nos services publics, leur mise en compétition croissante avec le privé, l’intégration d’une logique de plus en plus « manageriale » où on use à la corde les enseignant-es, infirmiers-ères, PAB, etc. Tous ces éléments visent un seul et même but : celui de poursuivre et achever avec le démantèlement monopole public sur nos services sociaux et de les arrimer aux intérêts capitalistes.
Par ce mandat de grève, ce sont 150 000 salarié-es qui lancent un ultimatum à François Legault et mettent au clair le fait que devant cette pandémie, tous et toutes ne logent pas à la même enseigne. Ceux et celles qui tiennent nos services publics à bout de bras, soit ceux et celles qui sont aux premières lignes contre cette pandémie meurtrière, sont ceux et celles qui la subissent le plus pendant que les Alain Bouchard, PDG de Métro et autres capitalistes de ce monde y voient des opportunités d’affaires.
Selon les libellés actuels, la grève n’est pas actée. C’est pourquoi nous, communistes, enjoignons les cadres de la CSQ à élaborer un plan d’action le plus rapidement possible pour faire de cette grève un moment fort de la résistance de la classe ouvrière québécoise. Nous encourageons également le mouvement syndical seulement mais aussi la population en général à emboiter le pas et appuyer concrètement cette grève.
D’emblée, le gouvernement Legault fera tout en son pouvoir pour la vilipender et prendra à parti la population contre les syndicats. À nous de lutter contre cette tentative de division et de gagner la population à ce mouvement, car un meilleur service public passe par de meilleures conditions de travail par ceux et celles qui en sont les artisans. À ce sujet, nous ne pouvons faire l’économie de dénoncer la réforme Barrette et la loi 40 qui ont respectivement censuré tout ce qu’il restait de participation démocratique dans notre service de santé et aboli les commissions scolaires. Sans ces paliers de démocratie locale, le lien entre les revendications des professionnel-les de la santé et de l’éducation d’une part et des usagers de l’autre est beaucoup plus difficile à rétablir.
D’autre part, nous ne pouvons nous empêcher de souligner que cet important vote de grève intervient dans un contexte particulier de négociations entre l’État québécois, premier employeur de la nation, et un demi-million de salarié-es du secteur public. C’est un cas inédit au Canada, voire en Amérique du Nord, en termes de rapport de forces favorable à la classe ouvrière à un point tel que ces négociations donnent le la des différentes luttes ouvrières (syndicales ou non) au Québec pour la période à venir.
En ce sens, il est malheureux de constater que, faute d’avoir pu conclure une entente en vue d’un front commun entre les centrales syndicales il y a un an, la CSQ se retrouve à faire cavalier seul. La différence entre 125 000 salarié-es et 500 000 est de taille sans compter que si tous les employé-es du secteur public font grève ensemble, le gouvernement-employeur ne peut prétendre utiliser l’arme de la division aussi facilement. Il reste qu’il n’est pas trop tard pour le reste du mouvement syndical québécois d’emboiter le pas et de faire de la solidarité de classe son mot d’ordre.
Cette bataille dans laquelle la CSQ semble s’engager a un potentiel énorme : celui de placer le mouvement syndical et ses revendications au centre de la sortie de crise de la COVID19, mais aussi de la riposte contre François Legault et ses politiques réactionnaires. La question maintenant, c’est de savoir si le reste du mouvement syndical embarque et s’engage dans une voie combattive ou s’il poursuit comme si de rien était et s’inscrit dans une logique de collaboration.