Le Parti communiste du Québec (PCQ-PCC) condamne le projet de loi 23 porté par Bernard Drainville. Celui-ci s’inscrit dans un contexte de privatisation de nos services publics et d’un remodelage économique où les services publics deviennent des entreprises publiques au service des monopoles.
Dans les grandes lignes, la loi propose plus de centralisation et de pouvoir pour le ministre (nommer et licencier les dirigeant-es des centres de services scolaires, plus de contrôle sur la formation continue des professionnel-les), l’abolition du Comité d’agrément des programmes de formation à l’enseignement (organisme indépendant du ministère qui prend en charge le dossier de la formation continue), la réduction du champ d’action du Conseil supérieur de l’éducation (sa mission passe de l’éducation en général “aux questions relatives à l’enseignement supérieur” seulement) et la création de l’Institut national d’excellence en éducation qui risque de se substituer à terme aux institutions existantes (le Conseil supérieur de l’éducation, les groupes et centres de recherches, le Centre de transfert pour la réussite éducative du Québec CTREQ).
Si la création d’un tel institut peut sembler une bonne idée à première vue, il n’en est rien. Celui-ci ne permettra pas davantage de recherche sur l’éducation, il la déplacera en son sein. La réforme permettra ainsi de centraliser la recherche dans un institut contrôlé par le ministère de l’Éducation, donc de contrôler les résultats et les données que le gouvernement veut bien rendre disponibles au public, aux journalistes et aux chercheurs indépendants. Si le ministre Drainville avait vraiment l’intention de baser ses décisions sur des données probantes, il aurait obligé son Ministère connu pour son opacité à être plus transparent et à rendre les données utiles disponibles aux chercheurs.
De plus, le ministre souhaite mettre en place des systèmes à l’allure assez lourde qui lui fourniraient des données sur le système éducatif québécois sur demande. Drainville a d’ailleurs affirmé vouloir un “tableau de bord” pour accéder en tout temps et en temps réel à toutes les données sur le réseau en entier – comprendre ici calculer la performance du corps enseignant et des intervenants du milieu.
La réforme s’inscrit totalement dans la lignée de celle promue par l’ancien ministre caquiste Jean-François Roberge en 2020. Elle avait supprimé les commissions scolaires pour les ressusciter sans ses commissaires élu-es. Cette réforme s’inscrit donc dans le même élan anti-démocratique.
La réussite scolaire, l’iniquité entre les différents systèmes (public, public avec sélection, privé), la pénurie de main d’œuvre, les infrastructures – tous ces problèmes que vit le système scolaire québécois ne seront presque pas, sinon pas du tout, abordés par la réforme, bien qu’ils soient ceux dont la population tient le plus à cœur.
Pour la CAQ, au final, il s’agit non pas de revaloriser le réseau public, mais de créer des structures centralisées qui orchestreront la mise en concurrence entre les différents systèmes et ainsi imposer l’hégémonie du privé.
On ne peut ignorer le fait que cette réforme est annoncée en pleine négociation du secteur public. Le gouvernement Legault cherche ainsi à mettre en compétition les différents salarié-es. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre le concept d’institut d’excellence et d’ordre professionnel en enseignement. Comme en Suède depuis les années 1990 (modèle qu’on aime bien citer comme exemple d’excellence), l’idée est de concevoir les directions scolaires comme conseils d’administration et les professeurs comme des employés et pourvoyeurs de service après-vente. Il s’agit là de la fin de l’éducation comme service public universel, donc de son remplacement par une version clientéliste.
De même, par voie détournée, il s’agit de concevoir le système d’éducation comme exclusif aux enseignant-es. Or, les différents intervenants tels que les professionnels et le personnel de soutien tous aussi essentiels les uns que les autres sont mis au rencart.
Loin de revaloriser le système public d’éducation, cette réforme ne permettra pas d’améliorer les conditions de travail exécrables des professeurs et autres agents d’enseignement, ni aux conditions d’études de notre jeunesse populaire qui continuera à fréquenter des écoles frappées d’une vétusté inimaginable. Au contraire, elle renforcera un système à trois vitesses déjà qualifié des plus inégalitaire au Canada.