LES DÉBARDEURS DU PORT DE MONTRÉAL LUTTENT POUR UNE MEILLEURE CONCILIATION TRAVAIL-FAMILLE.

Le 10 août dernier, après plus de deux ans de négociations et quelques débrayages au cours de l’été, les 1100 débardeurs du Port de Montréal déclenchent une grève générale illimitée. La paralysie qui a touché le Port de Montréal pour deux semaines en août nous fait apprécier l’importance du travail des débardeurs pour toute l’économie.

Le Syndicat canadien de la fonction publique local 375 (SCFP-375), qui représente les débardeurs, a indiqué que les employé.e.s du Port de Montréal était pratiquement en lock-out avant le vote de grève. Plusieurs bateaux ont ainsi été déroutés vers les ports de Halifax, de Saint-Jean et de New York pendant l’été. Ces décisions patronales ont coûté aux membres des heures de travail et ont provoqué le conflit de travail. Lors du vote, le 7 août, l’appui à la grève est quasi-unanime et le taux de participation dépasse 90%.        

Au premier jour du conflit, le port avait déjà accumulé deux semaines de retard sur le chargement et le déchargement des marchandises. De courts débrayages en juin et en août sont la cause des retards. Les coûts directs et indirects liés à une grève au Port de Montréal sont importants. Des millions, voire des milliards de dollars de marchandises sont retenues. Cette situation augmente la pression sur les parties et les force à régler leurs divergences. Il faut cependant ajouter que, dans le contexte actuel, les conflits de travail dans des industries dites « essentielles » mènent souvent à des lois spéciales et à des arbitrages. Il y a l’exemple des employé.e.s de Postes Canada forcé.e.s de retourner au travail en novembre 2018 par une loi spéciale. L’arbitrage imposé par le gouvernement est finalement rendu public en juin dernier; les employé.e.s se retrouvent évidemment désavantagé.e.s.       

Les débardeurs se retrouvent maintenant sans contrat de travail depuis l’automne 2018, après plus de 60 rondes de négociations. Le conflit de travail porte principalement sur les horaires et la conciliation travail-famille.  Les horaires de travail actuels des débardeurs sont inacceptables. Il ne faut pas s’étonner qu’ils en soient venus à la grève. Présentement, les débardeurs travaillent 19 jours sur 21 à l’exception des jours fériés et des fermetures exceptionnelles des installations portuaires. Chaque jour, ils et elles doivent également appeler entre 18h et minuit pour connaître leur lieu de travail et leur horaire du lendemain. Cette situation rend presque impossible la planification d’événements, complexifie inutilement le gardiennage des enfants et met à mal les relations interpersonnelles des employé.e.s. Ces activités remplissent pourtant des besoins psychologiques et sociaux essentiels. L’employeur soulève pour sa part que le salaire élevé des débardeurs justifie la grande «flexibilité» des heures de travail, impliquant qu’il est possible d’acheter la vie des employé.e.s. Le syndicat a aussitôt rappelé que les débardeurs n’ont pas honte de leur salaire et que la question des horaires de travail demeure pertinente.        

La grève au Port de Montréal touche aussi les 150 membres de l’Association internationale des débardeurs local 1657. Leurs revendications sont semblables à celles du SCFP-375 en ce qui concerne les horaires de travail. S’ajoutent à cela leurs préoccupations à propos de l’automatisation et ses conséquences sur l’emploi. Pour leur part, les membres du local 1657 travaillent 27 jours pour un jour férié. Ils travaillent ainsi 357 jours par année.   

La plupart des marchandises du monde transitent par bateau. Radio-Canada avançait récemment que 90 pour cent des produits consommés dans l’Est du Canada passent par le Port de Montréal. Le port approvisionne ainsi indirectement 110 millions de consommateurs. 

Des lobbys locaux et provinciaux comme la Chambre de commerce de Montréal, la Fédération des chambres de commerce du Québec et leurs bons amis au Conseil du patronat ont exigé du gouvernement fédéral une intervention musclée pour mettre fin à la grève. Ces demandes ne se sont pas concrétisées pour l’instant.

La pression exercée sur l’employeur a permis le 21 août la reprise des négociations et la signature d’une trêve de 7 mois . Le 23 août les débardeurs retournent au travail avec l’espoir de meilleures conditions en fin de compte. Il serait prématuré de se prononcer maintenant sur les négociations. L’employeur s’est montré intransigeant au niveau des horaires et de la conciliation travail-famille jusqu’à présent. Une chose est certaine, c’est que les travailleurs et les travailleuses doivent rester aux aguets et poursuivre leur mobilisation. La pression contre l’employeur doit être maintenue pendant la trêve. Une loi spéciale à la fin de la trêve reste une possibilité. La couverture du conflit par les grands médias a servi avant tout les intérêts patronaux en promouvant l’intervention du gouvernement comme une solution magique pour suspendre les droits des syndiqué.e.s. Il a très peu été question des revendications des grévistes. Il est essentiel de contrecarrer ces discours néfastes et de s’opposer à toute loi spéciale qui érode nos droits et nos conditions de travail.  

Soutenons les travailleurs et les travailleuses du Port de Montréal et soyons le porte-voix de leurs revendications. « Je suis débardeur-375: Jamais tu me casseras! »