Au cours des derniers jours, on a entendu le Chef conservateur, Erin O’Toole prétendre prendre fait et cause pour les travailleur-euses. Parmi les artifices qu’il invoque on peut souligner la proposition d’étendre à 52 semaines la prestation d’Assurance-Chômage en cas de maladie – une proposition qui tranche avec les Libéraux qui, avant la pandémie à l’hiver 2020 avaient refusé une telle motion pourtant appuyée par les partis d’opposition.
O’Toole et les conservateurs à gauche du Parti libéral, voilà qui peut bien faire jaser! Mais qu’en est-il vraiment?
La vérité est que depuis son existence, le concept même d’assurance-chômage est honni par la classe dirigeante. Contrairement à ce que prétendent les commentateurs économiques favoris de celle-ci, le chômage n’est pas une « anomalie » du capitalisme, mais plutôt un élément essentiel qui permet de contrôler les salaires en faisant pression à la baisse sur ceux-ci. L’idée d’Assurance-Chômage tranche avec les lois naturelles du capitalisme puisqu’il porte en lui la possibilité de faire en sorte que, pour le patronat, il soit plus onéreux de maintenir au chômage des travailleur-euses que de créer des emplois de qualité et les maintenir productifs pour peu que ce système serve réellement l’intérêt des travailleur-euses.
Même si l’implantation d’un tel système est lié en grande partie aux mobilisations du mouvement ouvrier et en particulier des communistes qui ont su faire tomber le gouvernement conservateur de R.B. Bennett sur cette question en particulier à la suite de la Marche sur Ottawa en 1935, il reste que depuis des décennies, notre système d’Assurance-Chômage est mis à mal d’année en année et sert de bouée de sauvetage pour les capitalistes bien plus que pour les salarié-es. Ainsi, aujourd’hui :
- Seuls 42% des salarié-es y ont accès (même si tous et toutes y contribuent);
- Au mieux, ceux et celles qui y ont accès aspirent à 55% de leurs revenus;
- Une personne qui perçoit d’autres indemnités (notamment des indemnités parentales) peuvent en être exclues, une mesure qui s’attaque particulièrement aux femmes.
Lorsqu’Erin O’Toole parle d’étendre la période de chômage, ce n’est que pour cause de maladie, voire de maladie grave. Il s’agit là d’une annonce clairement électoraliste puisqu’en aucun cas il ne parle de bonifier réellement l’assurance-chômage. Comme pour les retraites qu’il veut par capitalisation, il n’a aucun problème à financer les personnes privées d’emploi si c’est pour des causes externes à la dynamique du capitalisme. Néanmoins, s’il s’agit de chômage technique ou de licenciements économiques, pour lui comme pour les autres d’ailleurs, il semble que le système fonctionne très bien.
D’ailleurs, la sincérité des conservateurs, lorsqu’il s’agit de « bonifier » l’Assurance-chômage, a de quoi être mise à mal : en 2008, et ce, en toute illégalité, le gouvernement Harper (duquel O’Toole a été ministre) a volé 57 milliards de dollars dans la caisse de l’assurance emploi pour équilibrer un budget. Il n’y a qu’un mot pour décrire un tel geste : hold-up!
Quant aux Libéraux, ils ont eu une occasion rêvée d’étendre l’Assurance-chômage. Au plus fort de la pandémie, 5,5 millions de personnes étaient privées d’emploi. Parmi celles-ci, 75% n’y avaient pas accès. Au lieu d’étendre ce programme universel, Trudeau et son gouvernement ont préféré instituer des aides temporaires comme la PCU, laissant sous-entendre qu’un jour, les travailleur-euses (et non le patronat) devrait payer la facture notamment par des mesures d’austérité (c’est d’ailleurs pour cette raison que Libéraux et Conservateurs rivalisent pour contrôler une majorité à Otttawa).
Ni le Bloc, ni le NPD ne sont en reste dans cette histoire. Yves-François Blanchet parle depuis le début de la campagne de la nécessité de « suspendre » la PCRE (alors que près d’un million de travailleur-euses en ont besoin pour joindre les deux bouts). Une telle mesure revient à faire porter le blâme du chômage sur les travailleur-euses et non sur les employeurs incapables de garantir des conditions de travail et salaires décents à leurs employé-es. Quand au NPD, il ne propose aucune bonification substantielle de l’Assurance-chômage.
Seuls les communistes, fidèles à leur histoire et à leur engagement en faveur de la classe ouvrière proposent une vraie réforme de l’assurance-chômage de sorte que celle-ci soit en phase avec son objectif initial, soit celui de faire payer le patronat pour le chômage induit par le système capitaliste. Avec une assurance-chômage non-contributoire (c’est-à-dire financée à 100% par l’employeur), universelle (c’est-à-dire ouverte à tous et toutes y compris aux primo-demandeurs d’emploi) qui couvrirait 90% des revenus antérieurs et ce, pour toute la durée du chômage, il ne fait aucun doute que le patronat y penserait à deux fois avant de mettre à pied des salarié-es, même en temps de crise.